La voie de l\'excellence / Français Second Cycle

La voie de l\'excellence / Français Second Cycle

Table ronde sur Une si longue lettre de Mariama Ba

Lycée de Ndoffane                      ---- 2006 / 2007 ----                         Cellule de Français

 

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PRESENTATION

 

Le roman Une si longue lettre a acquis des lettres de noblesse au collège en suscitant débats et controverses, intérêts et passions et dans cet ordre d’idées, aujourd’hui cette table ronde autour du thème « La société sénégalaise au miroir d’Une si longue lettre de Mariama Bâ. »

 

Si évident que cela puisse paraître à première vue, qu’il nous soit permis de préciser que cette table ronde procédera en droite ligne d’une lecture sociale du roman, afin de percer le secret d’un certain nombre d’allusions pédagogiques jamais explicitées aux élèves.

 

En effet, en partant du postulat stendhalien selon lequel « Un roman est un miroir que l’on promène le long d’un chemin », nous voudrions vérifier comment Une si longue lettre pourrait nous aider à comprendre en profondeur la société sénégalaise.

 

 

Qui sont ces personnages qui évoluent dans ce roman ? Qu’est-ce qui les caractérise ? Quelles valeurs incarnent-ils ? Quels rapports entretiennent-ils entre eux ?

Pour répondre à ces questions, nous allons solliciter l’éclairage de Monsieur Marone.

 

Egalement, nous savons que la société sénégalaise accorde un intérêt tout particulier à la tradition. Or déjà et bien avant la production d’Une si longue lettre, la société africaine a été profondément pénétrée par les valeurs occidentales qui poussaient le continent noir vers la modernité. Alors, comment tradition et modernité se côtoient et s’affrontent dans le roman de  Mariama Bâ. 

Sur cette question interviendra Mademoiselle Anta Fall Guaye.

 

Aussi, savons-nous que le roman est une longue correspondance de Ramatoulaye à sa meilleure amie Aïssatou, mais surtout que dans ce roman est traitée le problème de l’amour. Alors, nous nous demanderons quels traitement Mariama Bâ fait-elle de l’amitié et de l’amour. Comment, dans le roman, passe-t-on de l’amitié à l’amour ? Et quelles puissances cachent ces deux relations qui unissent les hommes ?

 A ces questions répondra Madame Coumba Seck Ndiaye.

 

Ce qu’il faut aussi noter, c’est qu’on ne peut pas parler d’amour sans penser un seul instant au mariage et dans le contexte africain, qui parle de problème du mariage dit ou sous-entend polygamie. Alors, quels traitements Mariama Bâ accorde-t-elle aux questions de mariage et de polygamie ?

Sur cette dernière question interviendra Mademoiselle Amie Soumaré.

 

 

Ces différents éclairages seront suivis d’une contribution du doyen de la Cellule de Français, Monsieur Modou Ngom.

 

BEN MOUSTAPHA DIEDHIOU

PROFESSEUR DE Français des Lycées

benmoustaphadiedhiou@yahoo.fr

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Lycée de Ndoffane                      ---- 2006 / 2007 ----                         Cellule de Français

 

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« La société sénégalaise au miroir d’Une si longue lettre de Mariama Bâ »

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Communication1

 

« Rôle des personnages dans Une si longue lettre »

Parler des personnages dans Une si longue lettre, sera l’occasion pour nous de rappeler que ce roman n’est pas un roman autobiographique mais plutôt un roman fictif dans lequel l’auteur crée des personnages  et leur assigne un rôle bien déterminé.

Ainsi on pourra diviser les personnages en quatre grands groupes.

I Les deux couples

1) Ramatoulaye / Modou Fall

                                                *Ramatoulaye : C’est la narratrice. Elle est « issue d’une grande famille de cette ville, ayant des connaissances dans toute les couches sociales… ». Elle est fervente croyante  (p 9 ,114,153…). Elle s’est mariée avec Modou Fall, il y a  30 ans, malgré l’opposition de ses parents, et en a eu 12 enfants. Elle est investie d’une mission celle de contribuer à l’épanouissement et la l’émancipation de la femme noire, car cette dernière souffre aussi bien dans sa société que dans son foyer : elle est marginalisée ; ses droits sont limités et parfois même inexistants. Elle joue le rôle de domestique dans la maison. A l’image de la femme africaine noire, Ramatoulaye est donc épouse, mère et femme au foyer. Dans son ménage elle connaît la trahison : après de nombreuses maternités (12 enfants), elle est délaissée, abandonnée, oubliée. Malgré toutes ces peines Ramatoulaye s’accroche à son mariage et continue de vivre dans le silence et dans la soumission.

                                        *Modou Fall : Intelligent et ambitieux, il est devenu conseiller technique au ministère de la fonction publique, après une licence en droit. Prévenant et clairvoyant pendant sa jeunesse, il semble perdre la raison en vieillissant. Il est tombé amoureux d’une copine de classe de sa fille aînée et l’a épousée. Après quoi, il a trahi, abandonné, oublié sa première femme et ses enfants.

 

2) Aïssatou / Mawdo Ba

                                          *Aïssatou est bijoutière, élégante et charmante. Elle est victime du stratagème de sa belle mère tante Nabou qui n’a jamais pu  lui pardonner son origine « castée » de bijoutière. Lorsque Tante Nabou provoque son divorce avec Mawdo Ba, elle comble alors sa solitude avec la lecture, les études pour gagner sa vie et devenir indépendante.

                                         *Mawdo Ba : C’est un toucouleur, fils de princesse descendant de Buur Sine. C’est un bon médecin. Il brave les interdits de sa famille, résiste à la pression sociale et épouse Aïssatou la bijoutière. Mais sa faiblesse explique la réussite du plan de sa mère qui a fini par briser son mariage avec Aïssatou.

 

II Les coépouses

 

                                      *Binetou  (coépouse de Ramatoulaye)

 

Elle est la deuxième femme de Modou Fall. Elle est mère de trois enfants. Au départ amie de classe de Daba la fille aînée de Ramatoulaye, jolie et timide au début, Binetou se métamorphose sous l’effet du sérieux problème que lui pose « le vieux » et qu’elle épouse sous la pression de sa mère.

Après elle devient exigeante et se moque du vieillissement de Modou Fall. Elle roule dans une Alfa Roméo fréquemment changée (p 23). « …qui permettaient les changements continuels des « Alfa Roméo » de Bintou » Mais elle a fini par devenir malheureuse, ayant sacrifié sa jeunesse, elle est morte intérieurement et son drame sera très dur pour elle et sa mère.

                    * La petite Nabou (coépouse de Aïssatou)

Elle est la deuxième épouse de Mawdo Ba dont elle eu déjà deux garçons. (p 65) «… deux garçons étaient déjà nés » Amenée toute jeune dans le ménage de Aïssatou, elle fréquente l’école française grâce à l’intervention de Ramatoulaye. Elle devient sage-femme et n’a pas résisté à l’intrigue de Tante Nabou qui a réussi à faire d’elle la deuxième épouse de Mawdo Ba.

 

III Les prétendants (ce qui ont cherché à se marier avec Ramatoulaye après son veuvage)

 

                   *  Tamsir : C’est le frère aîné de Modou Fall. Il déclare à Ramatoulaye son intention de la marier après son veuvage. (p111, 112) « Après ta « sortie » (sous entendu : du deuil), je t’épouse. Tu me conviens comme … » Il essuie un échec cuisant. « Et tes femmes Tamsir ? Ton revenu ne couvre ni leur besoin, ni ceux de tes dizaines d’enfants…Je ne serai jamais le complément de ta collection », dit Ramatoulaye à Tamsir.

                         *Daouda Dieng : C’est le premier prétendant de Ramatoulaye dans sa jeunesse. Il est sorti de l’école africaine de médecine. La mère de Ramatoulaye le préférait à Modou Fall. Député à l’assemblée nationale, Daouda continue d’exercer la médecine par sens civique. Il réitère sa demande en mariage à Ramatoulaye après son veuvage. Lui aussi, essuie un échec. Ne supportant pas que Ramatoulaye lui propose une simple amitié il répond : « Tout ou rien ; à dieu »

IV Les enfants de l’héroïne (Ramatoulaye)

Ils sont douze :

                      *Daba Fille aînée de Ramatoulaye et de Modou Fall, amie de Binetou, elle est trop atteinte quand elle apprend que son amie est devenue la rivale de sa mère. Elle se montre contre son père  et pousse sa mère à demander le divorce. (p 78) « Romps, maman ! Chasse cet homme. Il ne nous a pas respectées, ni toi ni moi. » Elle joue pleinement son rôle d’aînée : elle seconde sa mère dans l’éducation des enfants, tente d’éviter des peines à sa mère aux moments durs sur le plan financier. Elle se marie avec Abdou qui la traite avec respect. Elle semble illustrer la jeune fille moderne consciente de ses devoirs mais aussi de ses droits.

                   *Mawdo Cadet de Daba et homonyme de l’ami de Modou Fall Mawdo Ba. Il a des dons remarquables en littérature. Il s’insurge, rouspète contre un professeur raciste qui privilégie un autre élève blanc.

                 *Aïssatou : homonyme de Aïssatou la bijoutière  destinataire apparente de la lettre. Elle prend la relève de Daba dans la marche de la maison. Elle rencontre Ibrahima Sall, étudiant en droit. Tous les deux tombent amoureux l’un de l’autre. Elle sera par la suite enceinte.

              *Aminata et Awa : ce sont deux jumelles.

                    *Arame – Yacine et Dieynaba : C’est le trio inséparable. Elles fument et portent des pantalons, provoquant la colère de leur mère.

             *Alioune et Malick  ont eu un accident de vélomoteur par leur faute.

             *Omar : Il est âgé de huit ans.

             *Ousmane : C’est le dernier né, âgé de six ans. Il est l’ami de Tante Aïssatou et lui apporte les lettres de sa mère. C’est un enfant gâté.

 

NB : Il faut remarquer que dans le roman, l’homme est présenté de façon très négative. Nous le retrouvons cet être derrière les souffrances de toutes les femmes, comme si les malheurs de celle-ci n’ont pour nom : l’homme. Il a tous les défauts du monde : traître, polygame, menteur, profiteur, irresponsable, etc..                                                                                                                                                                                  

                                                                                         Monsieur Mamadou Marone

Lycée de Ndoffane                      ---- 2006 / 2007 ----                         Cellule de Français

 

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« La société sénégalaise au miroir d’Une si longue lettre de Mariama Bâ »

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Communication 2

 

« Tradition et modernité dans Une si longue lettre »

 

  Une si longue Lettre est conçue comme une longue lettre que la narratrice, Ramatoulaye, adresse à sa meilleure amie Aïssatou et dans laquelle elle évoque ses souvenirs.

 

  En parcourant ce roman, certains thèmes retiennent notre attention, à savoir,  l’amitié, l’amour, la  tradition et la modernité.    Nous aborderons alors les deux derniers thèmes cités.

 

En réalité, les deux notions de tradition et modernité se côtoient, varient et s’affrontent dans le roman.

 

Qu’est-ce que c’est que la tradition et comment se manifeste-t-elle dans le roman ?

 

La tradition, ce sont les manières de faire transmises par les générations antérieures. C’est dans Une si longue Lettre, l’ensemble des pratiques coutumières et des considérations relevant du passé. Dans le roman, les vieilles personnes (la mère de Mawdo Ba Tante Nabou et celle de Ramatoulaye) demeurent les dépositaires de la tradition. La tradition est symbolisée par l’attitude, le comportement de la mère de Mawdo Bâ et celle de Ramatoulaye.

 

  A propos du mariage par exemple, chacune de ces mères veut que son enfant se marie conformément à la tradition, donc avec celle ou celui qu’elle lui aura choisi. Tante Nabou avait du mal à accepter le mariage de son fils avec une bijoutière (Aïssatou). Elle parle de « sang ». Elle incarne une vieille tradition conservatrice des valeurs ancestrales : « Un Toucouleur qui convole avec une bijoutière, jamais il n’amassera d’argent (…) ». Elle n’a ménagé aucun effort pour se venger de cette femme. S’obstinant dans les vérités anciennes, elle s’accroche à ses origines de descendante de Bour Sine (Chap. 11, p. 53). Elle réclame le retour du sang à sa source ; ce qui provoquera plus tard son voyage à Diakhao où elle sera considérée et traitée comme une reine.

 

  A propos de Ramatoulaye, la narratrice, son mari (Modou Fall) fait ce qu’il veut sans la consulter au préalable ; malgré cela, elle ne réagit pas et doit cacher ses sentiments pour être respectueuse des traditions.

Contrairement à cette femme, le rôle de la femme moderne est donc de lutter avant tout pour la reconnaissance de ses droits et surtout de combattre ces pratiques traditionnelles injustes et abusives qui sont propres aux sociétés africaines.  Cela pose alors le problème de la modernité.

 

Qu’est-ce que c’est que la modernité ?

 

On peut dire pour être simple que la modernitéest une force qui s’oppose à la tradition.

En réalité  les deux notions de tradition et modernité se côtoient et s’affrontent dans le roman. Dans le roman, la modernité apparaît à travers la manière dont Mawdo Bâ et Ramatoulaye se sont comportés. Ces deux personnages ont su être de leur temps et ont choisi d’épouser celle et celui qu’ils aiment et cela contre le gré de leurs parents.

Ce qui dans la tradition était une gageure (quelque chose dont la réalisation est très incertaine). « Notre mariage se fit sans dot, sans faste, sous les regards désapprobateurs de mon, devant l’indignation douloureuse de ma mère frustrée, sous les sarcasmes de mes sœurs surprises dans notre ville muette d’étonnement… » (Chap. 7, P. 35) dit Ramatoulaye parlant de son mariage avec Modou Fall.

 

C’est surtout Ramatoulaye qui constitue une charnière entre la tradition et la modernité. Elle n’ignore rien de la tradition et l’applique dans la vie de tous les jours. Elle est en même temps de la modernité : elle aime le cinéma, la lecture, les pique-nique, les discussions politiques (Chap. 19, P. 122). De même que sa « copine » Aïssatou, à qui elle adresse cette lettre, elle a fait acte de bravoure et de fierté. Aïssatou rompt ainsi avec une certaine tradition que nul n’a jamais réellement osé remettre en question. Les deux « copines » modernes oeuvrent aussi pour la promotion de la femme africaine. Elles étaient considérées comme des diablesses, des écervelées. 

 

   Daba et son mari plaident pour le modernisme et critiquent aussi la tradition (l’homme fait la cuisine pour sa femme).

 

 

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  En définitive, nous pouvons dire que dans une Afrique partagée entre modernisme et tradition, ce roman garde encore toute sa pertinence et sa justification. De ce fait, la question de l’éveil des consciences est encore actuelle en Afrique.

 

 

                                                                                   Madame Anta Fall Gaye Thiaw

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lycée de Ndoffane                      ---- 2006 / 2007 ----                         Cellule de Français

 

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« La société sénégalaise au miroir d’Une si longue lettre de Mariama Bâ »

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Communication 3

 

« Amitié et Amour dans Une si longue lettre »

 

 

Tout au début de mon propos, je soulignerai d’abord que l’un des sentiments merveilleux qui habite le cœur des personnages et qui souvent modèle leur conduite, c’est l’amitié.

 

Mon intervention cherchera alors à voir comment dans le roman on passe de l’amitié à l’amour et la force contenue par chacun de ses sentiments.

 

Tout d’abord qu’est-ce que l’amitié?

 

Le dictionnaire nous dit que : « l’amitié est un sentiment de bienveillance affectueuse et de sympathie que l’on éprouve à l’égard de quelqu’un et qui exclu l’attirance amoureuse. »

 

Dans le roman nous savons que c’est l’amitié qui permet cette correspondance. Ramatoulaye confie les secrets de sa vie à sa meilleure amie Aïssatou. L’amitié implique donc la confiance. Elle joue un rôle extrêmement positif car elle permet grâce à la magie de la confiance de se libérer de ses problèmes. Ramatoulaye en se confiant à Aïssatou trouve donc le soulagement. Elle peut ainsi supporter son fardeau.

 

Cependant comment naît cette amitié ?

 

Il faut dire que l’amitié entre Ramatoulaye et Aïssatou a des origines lointaines : leurs deux grands-mères d’abord, puis leurs tantes, leurs mères et enfin elles-mêmes. Cette amitié s’agrandit et s’ouvre au genre masculin. Mais ici l’amitié se pose en terme d’équation : Rama est l’amie du cœur de Modou. Ceci conduit à poser une sorte d’équation à données complémentaires :

 

 

1 - Aïssatou est l’amie de Rama.

2 - Modou est l’ami de Mawdo.

3 - Ramatoulaye est l’amie de Mawdo.

 

Si l’on applique le principe selon le quel «l’ami de mon ami est mon ami », alors Aïssatou est l’amie de Modou.

 

Egalement, ce même principe allongé devient « l’ami de l’ami de mon ami est mon ami » alors nous pouvons conclure que Aïssatou est l’amie du cœur de Mawdo.

 

Ici l’amitié conduit vers l’amour. Mais Ramatoulaye précise « l’amitié a des grandeurs inconnues de l’amour. Elle se fortifie dans les difficultés alors que les contraintes massacrent l’amour ».

 

Alors qu’est-ce que l’amour ?

 

Le dictionnaire nous dit que « l’amour est un sentiment d’affection profond qu’éprouve une personne pour une autre. » De ce fait nous pouvons remarquer une relation amoureuse entre Ramatoulaye – Modou, Aissatou-Mawdo, Jaqueline-Samba Diack, Daba-Abdou, la petite Aissatou-Iba sall.

 

Mais comment se manifestent ces différents amours dans le roman ?

 

Les manifestations sont diverses. Nous pouvons citer d’abord celles de l’amour entre Ramatoulaye -Modou, Aissatou-Mawdo.

 

D’abord la romancière crée un rendez-vous et un espace de rencontre : c’est le bal où vont se côtoyer des cœurs à prendre et des cœurs libres.

 

A partir du bal l’invitation à la danse favorise l’échange verbal. Ramatoulaye dira : « Modou  à l’instant ou tu t’inclinant devant moi pour m’inviter à danser, je sus que tu était celui que j’attendais. Quand nous dansions ton front se pencher sur le mien le même sourire heureux éclairait nos visages. »

 

Cette clarté sur le visage, nous disons, est le signe d’une compatibilité de deux cœurs fait l’un pour l’autre, fait pour se posséder mutuellement donc pour s’aimer. Les signes ne manquent pas. Ramatoulaye renchérit « la pression de ta main devenait plus tendre, plus possessive ». L’amour est donc naît dans les deux cœurs.

 

Après cela Modou pour confirmer cet amour à cette beauté qui désormais perturbe son sommeil confie sa parole à sa plume. Il envoie à Ramatoulaye une lettre d’amour. Là commence une vie faite de joie et de rêve. Dans sa solitude européenne il envoie une autre correspondance à sa tendre négresse, à l’amour de sa vie, à qui il confie : « Tu es ma négresse protectrice ».

 

 

Simplement pour dire que le pouvoir de l’amour est immense. Il peut conjurer le mal de vivre, la solitude, l’ennui et même la faim.

 

Quant à Samba Diack, il est allé chercher sa douce moitié lion de sa terre natale, en Cote d’Ivoire. Ceci montre que l’amour ne connaît pas les frontières. La preuve, Mawdo va, contre l’avis de sa mère épouser une bijoutière.

 

Du reste l’amour fait donc bafouer les contraintes sociales.  Quand on  aime on est sourd, on est aveugle. D’ailleurs, ne dit –on  pas que  « l’amour est un véhicule sans frein conduit par un chauffeur aveugle. »  La preuve est bien  présente dans Une si longue lettre car tous les amours y défient les contraintes et en grande partie  atteignent la phase de mariage malgré les obstacles imposés.

 

 Aussi  faut-il souligner que  toutes ces amours sont des amours de jeunesse  nées suite à des rencontres dans des lieux plus ou moins conventionnels : bals, anniversaire, école, maison, etc.         

 

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En définitive, dans Une si longue lettre, l’amitié est beaucoup plus évoquée que l’amour. Cela prouve que l’amitié est la raison d’être du roman. Mais, nous nous demandons si ce traitement de la part de Ramatoulaye n’est pas surtout lié au fait que son amour a été trahi.

        

 

                                                                                      Madame Coumba Seck Ndiaye

 

 

 

 

Lycée de Ndoffane                      ---- 2006 / 2007 ----                         Cellule de Français

 

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« La société sénégalaise au miroir d’Une si longue lettre de Mariama Bâ »

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Communication 4

 

« Mariage et polygamie dans  Une si longue lettre  »

 

Le roman Une Si longue lettre qui retrace les différentes étapes et péripéties de la vie de deux amies d’enfance, Ramatoulaye et Aïssatou, pose de façon très nette les thèmes de mariage et de  polygamie.

Qu’est ce que le mariage ? Comment les mariages sont-ils contractés dans Une Si longue lettre ? À quels problèmes sont-ils confrontés ? Quel est l’effet de la polygamie sur les différents mariages ? Quel comportement adoptent les différents personnages vis-à-vis de la polygamie ?

 

I -      Qu’est ce que le mariage ?

Le mariage est défini comme l’union l’égale d’un homme et d’une femme. Et dans le roman il est défini « un acte de foi et d’amour, un don total de soi à l’être que l’on a choisi et qui vous a choisi » nous dit Ramatoulaye. C’est aussi selon Daba « une adhésion réciproque à un programme de vie … » (p.143).

Ainsi, l’on pourrait retenir que le mariage est un acte basé sur des principes plus ou moins complexes à savoir l’amour, la richesse, le sang, la religion.

 

 II – Comment les mariages sont-ils contractés ?

Mariage par amour, par intérêt, par respect de la tradition.

-          Mariage par amour :

Les mariages de Modou FALL et Ramatoulaye et celui de Mawdo et Aïssatou. Tous deux se sont contractés par amour. Ces derniers se sont aimés depuis la jeunesse et ainsi il y a union sans le consentement des parents. Ramatoulaye l’évoque lorsqu’elle dit « je me suis marié sans dote. » Et au niveau de la lettre qu’elle adressa à Daouda Dieng son premier prétendant, elle lui souligne qu’une femme ne se marie jamais avec un homme qu’elle n’aime pas : « Tu poursuis une femme qui est restée la même ; Daouda ; malgré les ravages intenses de la souffrance. » (p.132)

-          Mariage par intérêt :

Celui de Modou Fall et Binetou  qui  est contracté par matérialisme de la mère de cette dernière cette femme que Ramatoulaye appelle dame belle mère dans le roman. Voulant appartenir à une certaine catégorie de  « femmes aux bracelets lourds », elle n’hésite pas à mettre fin aux études de sa jeune fille et à la donner en mariage à un homme qui pourrait être son père. Binetou dira ouvertement à son amie daba qu’elle n’aime pas Modou Fall. Daba fera savoir  à sa mère « Maman ! Binetou, navrée épouse « son vieux ». Sa mère a tellement pleuré. Elle a supplié sa fille de lui donner une fin heureuse dans une vraie maison, celle que l’homme leur a promis. Alors elle a cédé. » (p.70)

-          Mariage par respect de la tradition :

Celui de Mawdo et de la petite Nabou. Tante Nabou, la mère de Mawdo, femme traditionnelle attachée à la vérité ancienne, défend farouchement son sang contre l’apport du sang d’une bijoutière, car Aïssatou en été une. Par là, elle manifeste  la volonté de purification du sang : « le sang doit retourner à la source ».

 

III - A quels problèmes sont-ils confrontés ?

Problème de caste :

Nous sommes dans une société traditionnelle où les mariages sont contractés en dehors de la caste. C’est pour quoi il y a eu beaucoup de rumeurs lorsque Mawdo a épousé Aïssatou. Ramatoulaye l’évoque lorsqu’elle dit « un mariage controversé. J’entends encore les rumeurs coléreuses de ville. Quoi, un toucouleur qui convole avec une bijoutière ? Jamais, il « n’amassera argent. »

-          Problème de trahison :

Binetou a trahi Daba sa meilleur amie. Cette dernière est blessée dans son orgueil lorsqu’elle a su que son amie s’était mariée avec son père.   

Problème de la polygamie :

 

IV - L’effet de la polygamie sur les mariages  et comportement des différents personnages vis à vis de ce phénomène

Dans ce roman Marïama Ba montre les choix différents que les femmes ont en face de la réalité de la polygamie : Partir ou rester. 

Aïssatou, l’amie de Ramatoulaye a décidé de quitter Mawdo Ba lorsqu’il a épousé la petite Nabou. Aïssatou  n’est pas polygame et pour elle, elle est libre de partir car elle n’a que deux enfants qu’elle a élevés d’une façon occidentale. Ainsi elle dira dans sa lettre à Mawdo « les princes dominent leurs sentiment pour honorer leurs devoirs, les autres courbes leur nuque et acceptent en silence un sort qui les brime. »  Mais l’héroïne a choisi de rester dans sa situation en acceptant de perdre une partie d’elle-même parce qu’elle aime son homme et la rupture est, pour elle, comme une défaite. Mieux, elle a un poids sur elle douze enfants à nourrir. Ne comprenant pas la justification du mariage entre Modou Fall et Binetou sa coépouse, elle pardonne et accepte le phénomène (polygamie) parce qu’étant femme africaine et croyante (musulmane). Et là elle développe la tendance destructive de la puissance de l’homme qui change les préceptes de la religion pour satisfaire ses intérêts. Donc Modou  Fall ne sait pas la loi islamique qui consiste à traiter toutes ses femmes d’une manière égale car elle a abandonné Ramatoulaye et ses enfants pour sa deuxième épouse.

En effet la polygamie, une pratique de la société change la vie de Ramatoulaye. Elle passe d’un mariage heureux et confortable à la solitude et à la recherche d’une identité sans mari. Ramatoulaye a préféré rester malgré les invocations de sa fille Daba qui folle de rage, car son père a épousé sa meilleure amie, conseille à sa mère le divorce. Ainsi elle lui dira : « Romps, maman ! Chasse cet homme, il ne nous a pas respectée ni toi, ni moi. Fais comme Tata Aïssatou, romps dis-moi que tu rompras. Je ne te vois pas disputant  un homme avec une fille de mon âge ». Mais Ramatoulaye accepte la tragédie de sa vie avec la polygamie de son amour. Ainsi, elle parle de la trahison des hommes : « Et pourtant, l’homme se prend pour une créature supérieure. A quoi lui sert son intelligence ? Son intelligence enfante aussi bien le beau que le mal, plus souvent le mal que le bien » (page 119).

Prenant conscience de l’injustice de sa situation et décidée à rechercher le bonheur, Ramatoulaye trouve que rien n’est plus beau que la liberté d’une situation maîtrisée. Elle doit sortir de l’eau et voir l’univers d’un œil clair et frais. Cela elle l’avait évoqué dés le début du roman (page 36) « Rien n’est plus beau qu’un poisson à la sortie de l’eau, avec son œil clair et frais, ses écailles dorées ou argentées et ses beaux reflets bleutés. » Donc elle doit vivre sans mari. Ainsi, elle retrouve son bonheur et rétablit son identité de femme forte.

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Ainsi, à travers les émotions subtiles de Ramatoulaye, personnage principal de l’œuvre, Marïama Bâ montre la nécessité pour les femmes africaines de lutter contre les pratiques injustes. La tristesse, la jalousie et l’espoir de Ramatoulaye font réfléchir sur les effets négatifs de la polygamie.

                                                                                           Mademoiselle Amie Soumaré                                                                                                                                                                          



11/11/2010

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