La voie de l\'excellence / Français Second Cycle

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Qu'est-ce que la littérature?

Thème : « la littérature et ses fonctions »

 

 

A la croisée de nos rapports avec les phénomènes de la vie et ceux de l’histoire, se trouve un art, la littérature qui, à travers une organisation particulière du langage, semble se définir comme l’un des plus aptes à rendre compte de la totalité du réel, à conjurer l’oubli et à cultiver chez l’humain l’aspiration vers une beauté supérieure et consolatrice, et ce, en passant par des formes privilégiées comme le Roman, la Poésie, le Théâtre, considérés comme les genres majeurs, le Conte, la Nouvelle, la Fable, considérés comme des genres mineurs. Mais alors, qu’est-ce que la littérature ?

QU’EST-CE QUE LA LITTERATURE ?

Revenant sur  l’apparition de la Littérature à l’horizon de l’humanité, Roland Barthes enseigne : « De ce qu’il n’y a point de parallélisme entre le réel et le langage, les hommes ne prennent pas leurs distances, et c’est peut-être ce refus aussi vieux que le langage lui-même qui produit dans un affairement incessant la littérature. »

Nous comprenons par là, qu’en contournant l’inaptitude du langage à livrer la réalité sans la déformer par les arcanes de l’invention, l’écrivain offre au lecteur une œuvre (création) où la fiction et la réalité se côtoient. La littérature n’est donc ni totalement vraie, ni totalement fausse, elle est entre le mensonge et la vérité.

Dès lors, elle se découvre des ennemis qui l’accusent de retarder la marche en avant de l’humanité. En effet, considérée par ses détracteurs comme une pure perte de temps, sinon l’occupation des gens oisifs, la littérature a très tôt été mise en demeure de se justifier. Elle se devait de mettre en évidence sa spécificité afin de se distinguer de l’industrie des loisirs.

Du Latin « Litteratura » qui veut dire écriture, le concept de littérature désigne d’abord tout ce qui a rapport avec la culture de l’esprit, sans être information, science ou technique. Cette définition du dictionnaire va très rapidement être renforcée par les conceptions des écrivains.

Ainsi, lorsque Jiang Zilong soutient que « La littérature est le chant du cœur du peuple et le peuple est l’âme de la littérature », nous comprenons d’une part que la littérature est une discipline qui s’occupe des préoccupations du peuple, préoccupations qu’elle a pour ambition de traduire et de révéler ; et d’autre part que le peuple est la raison d’exister de la littérature.

Cette étroite relation entre la littérature et le peuple va pousser Marcel Proust à considérer que « La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie réellement vécue, c’est la littérature (…). » Aux  yeux de Proust, la littérature est donc ce qui donne sens à l’existence. Elle est la forme par laquelle le réel devient signifiant et le moyen par lequel l’homme acquiert la claire conscience de ce que la vie ne livre que fugitivement. Par la littérature, l’homme découvre le monde dans sa complexité mais aussi se découvre lui-même. Ce qui nous amène à considérer avec Antoine Vitez que « [La littérature] est un champ de forces très petit mais où se joue toute l’histoire de la société et qui malgré son exiguïté sert de modèle à la vie des gens. »

Ainsi, la littérature devient pour l’homme le seul moyen mis à sa disposition pour se connaître et connaître le monde. Mieux nous dit Soljenitsyne, c’est l’unique moyen pour l’individu de dépasser son expérience limitée et de s’ouvrir à la diversité des situations humaines.

QUATRE GRANDES FONCTIONS DE LA LITTERATURE

 

I – UNE FONCTION DIDACTIQUE ET LUDIQUE

L’un des principaux objectifs de la littérature est, sans doute, de rendre l’homme meilleur. Ce faisant, elle apporte à l’homme un certain nombre de valeurs morales dont elle se propose de défendre et d’illustrer car à en croire La Bruyère, « On ne doit parler, on ne doit écrire que pour l’instruction. »

Ainsi, à côté de ce moraliste qui oriente l’action de la littérature dans l’instruction, on retrouve Molière qui quant à lui prétend « corriger les hommes en les divertissant. »

De ce point de vue, la littérature empêche l’homme d’être condamné à la solitude et de devenir une menace pour l’humanité toute entière. En effet, dans un monde où l’homme est replié sur ses propres valeurs et ne ressent que ce qui le touche directement, la littérature devient une voie de salut dès l’instant qu’elle songe autant à instruire les hommes qu’à les divertir.

Retenons avec Soljenitsyne que seule la littérature permet de transmettre « d’un homme à l’autre (…) tout le poids d’une très longue et inhabituelle expérience » en favorisant l’ouverture à la diversité des situations humaines.

En définitive, d’un point de vue moral, la littérature demeure une entreprise didactique visant à réformer la nature humaine.

 

II - UNE FONCTION MILITANTE

Confrontée aux problèmes du temps, de la société et de l’histoire, la littérature revêt une mission éminemment  politique. En effet, elle ne saurait s’en exclure car, selon Hugo, elle n’est pas destinée à vivre pour sa beauté propre mais pour servir le progrès, la science et la société. Dès lors, la littérature doit s’inscrire dans les luttes de son temps afin de tendre à l’humanité le miroir de sa propre déshumanisation.

Considérée très souvent comme une arme puissante au service des masses défavorisées, la littérature démontre  à juste titre, la nécessité d’une action qui engage la destinée de toute une communauté.

Elle dénonce et combat l’injustice tant au plan social que politique afin d’offrir à l’individu la liberté, car nous dit Camus, la seule finalité de la littérature c’est de libérer les hommes de tous les moyens d’oppressions qui pèsent sur leur corps et leur conscience en donnant « une voix à leur silence ».

Il soutient que la seule façon pour l’écrivain d’assumer les « deux charges qui font la grandeur de son métier [c’est d’être au] service de la vérité et (…) de la liberté ».

Sartre soutient d’ailleurs l’engagement de l’écrivain aux côtés de la société pour la bonne et simple raison qu’il « est en situation dans son époque [et que] quoiqu’il fasse, il est marqué, compromis ». C’est pourquoi Proust considère que la seule façon pour l’écrivain de servir efficacement la société, c’est  « de ne pas penser à autre chose qu’à la vérité qui est devant lui. »

 

III – UNE FONCTION CULTURELLE

Si la culture est  capacité d’autoréflexion, faculté d’analyse du moi et du monde, la littérature offre à l’homme la possibilité de se l’approprier en lui donnant les moyens de se comprendre ou tout au moins de s’interroger. En effet, la littérature permet à l’individu de valoriser sa culture ou de retrouver une identité culturelle qui l’améliore en dignité et en honneur.

 Cependant, loin de s’arrêter à l’affirmation de la force et de l’honneur d’être homme, elle permet à l’individu de s’arracher à l’animalité pour s’ouvrir à l’humanité en faisant de la différence une richesse. Dès lors, la littérature ouvre l’individu aux apports fécondants de l’extérieur. En effet, elle favorise le dialogue entre des civilisations, des esthétiques et des peuples différents pour une meilleure harmonisation des relations sociales mais aussi pour l’émergence d’une véritable culture de la paix. 

Mieux, elle favorise l’émergence d’un monde stable dans lequel le rêve et l’espoir sont permis car au banquet de l’universel c’est-à-dire au « Rendez-vous du donner et du recevoir », nous dit Proust, seule la littérature permettra de « retrouver, de ressaisir, de (…) connaître cette réalité loin de laquelle nous vivons », une réalité qui n’est rien d’autre que notre vie.

En définitive, pour qui cherche ses racines, la littérature peut être d’une très grande utilité parce qu’elle demeure sans conteste le réceptacle d’une culture universelle immensément riche et variée. 

IV – UNE FONCTION ESTHETIQUE

En engageant l’art et la littérature dans la résolution des préoccupations morales et politiques de l’homme, les écrivains avaient conscience qu’ils lui accordaient une grande utilité dans la vie. Malheureusement, cet utilitarisme de l’art avait lui aussi l’inconvénient de conduire la littérature vers son essoufflement. En effet, si la littérature ne sert qu’à défendre une cause sociale, elle perdrait sa raison d’être dès que la cause est dépassée.

Ayant très tôt compris le danger, les parnassiens vont, sous l’impulsion de Leconte de Lisle rappeler que la littérature est un art et que sa finalité devait simplement rester la quête permanente d’une beauté consolatrice. La création artistique doit donc rester gratuite. Pour  Théophile Gautier:

« Il n’y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid, car c’est l’expression de quelque besoin, et ceux de l’homme sont ignobles et dégoûtants, comme sa pauvre et infirme nature. L’endroit le plus utile d’une maison, ce sont les latrines. »

Nous comprenons par là que la littérature est au dessus des préoccupations sociales. Elle est d’abord et avant tout un art, et le propre de l’art est de refléter le beau. Une belle œuvre, en effet, survit à son créateur et à son temps. André Malraux dira simplement « L’art est un anti-destin. » Par sa beauté, l’œuvre littéraire participe de la purification du monde. La recherche du beau apparaît alors comme un refuge, une compensation aux désillusions de la vie.

C’est en cela que, considérée du point  de vue de sa valeur esthétique, la littérature se présente comme le moyen de vaincre les angoisses d’un être que le monde fascine et effraye. C’est pourquoi, elle ne survit à l’érosion du temps que par sa capacité à exprimer une réelle beauté, à passer d’une simple œuvre à un chef-d’œuvre. Malraux rappelle « Chacun des chefs-d’œuvre est une purification du monde ».  La littérature permet donc de dépasser la mort et les limites du réel.

CONCLUSION :

Issue d’une union originelle entre la réalité, le langage et l’imagination, la littérature sert à conter, à mettre en scène, à émouvoir, à combattre l’injustice, à lutter contre l’oubli, à instruire, à divertir et à préfigurer l’avenir. Elle reste de l’avis de Paul Eluard un objet de langage dont « les mots disent le monde et (…) disent l’homme, (…) [et] participent tous à l’élaboration de la vérité. » La littérature est, en définitive,  à travers ses différents genres (Roman, Poésie, Théâtre, Conte, Nouvelle, Fable) l’expression authentique de la sensibilité ou de la sagesse d’un homme.



09/11/2010

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