La voie de l\'excellence / Français Second Cycle

La voie de l\'excellence / Français Second Cycle

LE CONTE AFRICAIN

Ben Moustapha Diedhiou

Professeur de Français des Lycées

benmoustaphadiedhiou@yahoo.fr

LE  CONTE  AFRICAIN

Qu’il soit oral ou écrit, le conte africain est un récit généralement bref, relatant des faits imaginaires, et qui vise essentiellement à illustrer une leçon de morale. En effet, le conte se distingue des autres genres par sa capacité à exprimer de façon rigoureuse la structure virtuelle d’un groupe social, auquel il permet de comprendre ce qui, dans ses façons de penser et de sentir, fait sa spécificité. Miroir fidèle où s’enregistrent les problèmes de chacun et de tous, le conte est l’expression d’une conscience collective. Ainsi, écouter ou lire un conte c’est selon Amadou Hampâthé Bâ être en mesure d’en saisir les trois niveaux d’interprétation : - futile : c’est-à-dire ludique ; - utile : c’est-à-dire morale ;  - instructif : c’est-à-dire éducatif.

I – La Fonction Ludique du Conte

Le conte est espace d’intégration où à travers la théâtralisation, la communauté se célèbre. Transmis de génération en génération, le conte est dépositaire de la sagesse des anciens et de l’héritage traditionnel. C’est d’abord et avant tout un moment de récréation et de jeu. Le conte fait rire et le conteur par le canal du rire déclanché offre au public la possibilité de se détendre et de s’amuser. Le conteur invente alors toute une série d’épisodes qui en s’écartant de la réalité lui permettent d’atteindre son objectif qui est de décrisper l’atmosphère. D’ailleurs, le texte qui avoue franchement qu’il ne dit pas la vérité. C’est ce qui fait que le merveilleux y est fortement présent.

Le conte est ludique c'est-à-dire qu’il est merveilleux, fantastique, fictif, fantasmagorique. Il installe une sorte d’union féerique qui actionne le rêve grâce au merveilleux. La présence du merveilleux dans le conte africain peut se comprendre facilement, si l’on sait que l’Afrique traditionnel était animiste et entretenait des rapports directs avec les êtres extraordinaires, les djinns.

II – La Fonction Morale du Conte

Dans l’univers négro-africain, le conte constitue un processus de structuration qui élabore dans la conscience des auditeurs des tendances affectives, intellectuelles et pratiques orientées vers une réponse cohérente aux problèmes que posent leurs relations avec la nature et leurs relations inter-humaines. En effet, le conte livre un enseignement moral, parce que reflet de la conscience collective. Ainsi, en tant que sagesse oralement véhiculée, il prône des vertus cardinales : politesse, générosité, respect, sentiments et attitudes exemplaires. C’est d’ailleurs à juste raison que Equilbecq souligne l’utilité du conte dans le champ politique car pour gouverner les hommes il faut les connaître et le conte satisfait à cette exigence. Il écrit :

« Au point de vue politique, l’utilité des contes n’est pas moindre pour le fonctionnaire qui entend diriger les populations assujetties aux mieux des intérêts du pays qui l’a commis à cette tâche. Il faut connaître celui qu’on veut dominer de façon à tirer partie autant de ses qualités en vue du but que l’on se propose. C’est ainsi que l’on parvient à assurer sur lui un prestige moral qui donne la suprématie. »

III – La Fonction Didactique du Conte

Dans l’Afrique traditionnel, le conte est un moyen d’éducation au service du groupe. Il propage l’enseignement de la sagesse populaire et ses péripéties sont le reflet de tout ce qui s’est passé chez les humains depuis la création du monde. En effet, le conte est l’occasion de dénoncer les errements de tel ou tel de l’auditoire que chacun n’a aucun mal à reconnaître sous la fabulation. Tel découvre alors qu’on lui plaque à travers le jeu de paroles, le masque de l’âne, du bouc ou du lion sur le visage et doit comprendre dans le fil de l’anecdote ce que la voix populaire lui reproche et l’engage à corriger. Cet effet de correction sociale et publique est un moyen particulièrement efficace pour défendre le groupe contre ceux qui s’affranchissent des valeurs partagées qui en constituent le fondement.

Le conte est donc comme un sac profond car si loin qu’on y puise, on ramène toujours des poignets de secrets, d’évidences à la fois neuves et vieilles, des recettes de savoirs utiles et nécessaires. Ce sac n’a point de fond, parce que la sagesse et la vérité humaine qui sortent de ses profondeurs épousent tous nos gestes possibles, intelligents ou sots, habiles ou maladroits, généreux ou pingres.

CONCLUSION

Le conte est une école de style et de langage. Il contribue à maintenir le trésor de la langue dans sa pureté car le maître-conteur fait jaillir les expressions à la fois concises et savoureuses mais surtout conformes au génie de la parole des ancêtres. C’est une part importante du bagage culturel commode à porter tout au long de la vie et à transmettre aux générations qui suivront. Il faut donc y voir un facteur de continuité, de solidité dans la tradition car la transmission du conte se fait du grand-père au petit fils. En définitive, le conte indique à travers ses images, l’essence de la vie et la conduite qu’il convient d’adopter pour vivre vraiment en conformité avec la société. On le retrouve dans toutes les cultures et chez tous les peuples, d’où son caractère universel.

 



10/11/2010

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